Aujourd’hui j’ai noté que la salade et le persil et l’épinard que j’avais gardé dans un sac thermique au dehors de ma fenêtre avaient chauffé l’intérieur du sac, qui se trouvait aussi humide. Les plantes, enfermés, respiraient. J’ai aussi noté que je me suis finalement pardonné pour avoir insulté un professeur il y a vingt ans. C’est la première fois dans tout ce temps que je me sens à l’aise avec cette histoire. J’étais la parfaite andouille le jour de cet épisode. J’assistais au cours avec des écouteurs et un walkman. Le prof fait un erreur de calcul qui je note tout de suite et je dis au collègue à côté de moi – « ce prof est un vrai stupide », – sauf que, grâce à la musique que jouait dans me oreilles je l’ai dit à voix très haute. Le prof s’est arrêté pendant un instant, me faisant comprendre qu’il m’avait écouté, avant de continuer comme si rien ne s’était passé. Il fait ça avec la gentillesse et discrétion typiques de la culture japonaise dans laquelle il avait sûrement grandi, vu son nom et sa physionomie, malgré sa hauteur d’un mètre quatre-vingt-cinq. À la fin de l’année scolaire, moi et mes potes aimions beaucoup ce prof, mais je n’ai pas le courage de m’excuser auprès de lui. Je vois que dans le dictionnaire le mot « stupide » a pour synonyme « bête », mais je ne suis pas d’accord. Les bêtes ne m’ont jamais manqué de respect comme ça.